Avant Propos
Ce recueil aurait pu être intitulé La croisée des chemins: être Anglophone ou
Francophonisé? Mais aux fins de ne pas être réducteur ou encore myope avec
un problème d’ordre universel que régional, Bill F. Ndi a choisi
d’universaliser ce problème d’Anglophones au Cameroun dont les compatriotes francophones
en voudraient faire de la polémique toute en le tribalisant et en le concevant
comme le fait le monde occidental pour ce qui est de la contribution de Noirs
dans l’histoire de l’humanité. Pour l’occident, le Noir n’a rien apporté comme
contribution à l’humanité comme pour le francophone Camerounais, depuis Sardou
Daoudou, l’anglophone n’a rien apporté à l’union ou encore l’histoire de
l’anglophone au Cameroun ne peut être comprise que dans l’optique de l’unité
nationale, c’est-à-dire l’histoire du Cameroun francophone ou encore La République du Cameroun comme le pays
fut connu à « l’indépendance ». Pour ce poète, que le francophone au
Cameroun soit d’accord ou pas, l’histoire, prise comme témoin, met en exergue ce
mariage forcé ou la femme (l’Anglophone) en a marre et voudrait tirer sa
révérence alors que le brute de mari, qui ayant passé tout son temps à
tyranniser la femme, signe et persiste que l’union est légitime. Ce recueil en
français est une invitation au dialogue conciliatoire, dépourvu de toute
diabolisation, en dépit de ce que le poète conçoit comme la mauvaise foi de
francophone, quel qu’il soit, lorsqu’il traite le cas anglophone à la même
échelle que le cas Bamiléké ou encore Fang, Béti, Bulu, etc. il s’agit ici des
pleurs en la langue du tyran et ses acolytes pour qu’ils n’aient pas d’excuses pour
prétexter de ne pas comprendre « le Biafrais, l’anglo, le Bamenda, ou
encore l’ennemi dans la maison… » Ces épithètes sont les plus souvent
attribuées aux anglophones du Cameroun.
Les 82 poèmes de ce recueil visent
tout tyran comme l’imposture du francophone camerounais qui refuse de regarder
ses pairs (les anglophones) en face et d’admettre leur humanité et leur droit
de choisir. D’ailleurs, l’un des chanteurs Camerounais les plus engagé et d’illustre
mémoire aurait posé une question très simple dans l’un de ses morceaux où il
présentait une situation où il se serait entré en relation avec une personne et
quand il voudrait s’en séparer, cette dernière ne voulait pas lui laisser le
choix de se quitter comme il en avait au départ pour nouer la relation. Il
s’agit ici de Lambo Pierre Roger, alias Lapiro de Mbanga. Il
chantait : « na me a be fan am oh baby, if I talk sey a norh want am
again, na wetin be the problem? Tell me oh! » Ayant constaté que
l’union ne marche pas, comme l’anglophone qui serait à l’origine de l’union
avec son frère francophone de la République du Cameroun, Lapiro pose une
question de pointe : « si je vous dis que je n’en veux plus maintenant
d’où vient le problème ? Dit le moi oh ! » Ce qui est d’autant
plus étonnant c’est que le Camerounais francophone à sa place du maître
d’esclave reçoit le désir d’autonomie de ces anglophones, les lésés des
indépendances, avec le chant de pays uni et indivisible alors que l’histoire en
témoigne autrement. Bien plus, il parle de la sécession alors qu’il s’agit
simplement de demande d’autonomie. Quel que soit le cas, ce recueil n’est autre
qu’un appel au dialogue qui permettrait aux deux frères de bien comprendre le
fond des problèmes qui freinent tout progrès et les minent. Ainsi l’un ne se
verrait plus octroyé le droit divin de gestion d’un patrimoine fédéral au profit d’un
poigné de filous corrompus.
Comme souligné plus haut ce problème
qui semble être camerounais prend une tournée universelle lorsque la situation
des anglophones au Cameroun miroitent celle de noirs aux États-Unis avec le
mouvement contemporain de « Black Lives Matter » ou encore, la vie de noirs compte. Bien que cette
thématique se soit abordée par d’autres écrivains anglophones tels Victor Épié
Ngome, l’auteur de What God Has Put
Asunder, ce recueil évite de s’engager dans un dialogue des sourds avec un
oppresseur qui dirait ne rien comprendre en une langue qui n’est pas sienne.
Même avec mil ans d’atmosphère envenimée, le dialogue est toujours possible si
l’oppresseur accepte de reconnaître l’humanité de l’opprimé. Ce recueil de Bill
F. Ndi constitue de résolutions imaginaires des contradictions
socio-psychologique ainsi que politico-économique.
Pour finir, écoutez parler chaque mot,
chaque vers, et primez la raison à l’émotion bien qu’il vous la faut pour mieux
saisir cet objet esthétique dépeignant l’enfer dans lequel vous faites brûler
une partie de l’humanité, en l’occurrence les anglophones du Cameroun ou encore
les noirs partout ailleurs dans le monde. Sartre n’avait-il pas raison de
chercher à savoir pourquoi écrire ? N’est-ce pas disait-il que
« chacun a ses raisons : pour celui-ci, l’art est une fuite ;
pour celui-là un moyen de conquérir. […] on peut conquérir par les
armes. » ? Et n’ayant point écrit pour prendre fuite ni pour
conquérir par des armes, ce recueil fait soigneusement usage des mots pour
l’image des maux qu’ils sculptent quitte à troubler lecteur. Car le poète qui
ne peut ni appeler la laideur par son nom ni l’enjoliver avec la douceur de
mots qui frappent, devrait reconsidérer sa vocation poétique. Bref, la mission
poétique est d’enlaidir la beauté de l’oppression selon oppresseur. Le poète, Bill
F. Ndi, dans ce recueil, l’accomplit avec finesse.
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